Contexte et atouts du poste
Contexte
Pour Robert Watson, président de l’IPBES (Intergovernmental Science-Policy Platform on Biodiversity and Ecosystem Services) : "La santé des écosystèmes dont nous dépendons, ainsi que toutes les autres espèces, se dégrade plus vite que jamais. Nous sommes en train d’éroder les fondements mêmes de nos économies, nos moyens de subsistance, la sécurité alimentaire, la santé et la qualité de vie dans le monde entier. [...] [Cependant] il n’est pas trop tard pour agir, mais seulement si nous commençons à le faire maintenant à tous les niveaux, du local au mondial [...] on entend [par-là] un changement fondamental à l’échelle d’un système, qui prend en considération les facteurs technologiques, économiques et sociaux, y compris en termes de paradigmes, objectifs et valeurs" (2019, [1]). En France plusieurs organisations prennent ces alertes au sérieux et travaillent sur la construction d’alternatives quantifiées d’un point de vue biophysique (flux de matières et d’énergie). A titre non exhaustif :
- L’ADEME (agence de la transition écologique) a produit en 2021 4 scénarios contrastés pour 2050 [2] en mobilisant de très nombreux logiciels/outils sectoriels (souvent des tableurs Excel avec Macros, dont celui dédié à la biomasse non alimentaire que notre équipe STEEP a co-conçu),
- Le Shift Project a publié son Plan de Transformation de l’Economie Française [3],
- L’association négaWatt met à jour son scénario de transition énergétique [4] tous les 5 ans et commence à intégrer les consommations des matières premières associées au scénario,
- L’association/bureau d’étude Solagro produit le scénario Afterres [5] sur le secteur agricole et forestier (c’est également la partie «biomasse» du scénario négaWatt).
Le point commun de toutes ces initiatives est le besoin de parvenir à des bilans de flux équilibrés (ex : ce qui est consommé est produit ou importé), et de respecter certaines contraintes fixées par les concepteurs (ex : ne pas dépasser un certain seuil d’émission de gaz à effet de serre). L’équipe STEEP a débuté depuis un an le développement du logiciel STAX (
Mission confiée
Résumé
Dans un contexte de dégradations environnementales, différents travaux sont menés afin de remettre en question l’organisation biophysique de nos sociétés, avec un focus sur l’analyse des flux de matières et d’énergie. Dans la plupart de ces initiatives, il s’agit d’analyser la situation existante et de se projeter dans des alternatives permettant l’équilibre des flux, la maîtrise des pressions environnementales qui y sont associées, ainsi que l’intégration de contraintes supplémentaires, politiques, économiques et sociales. Afin d’accompagner et de faciliter ces analyses, et dans la continuité de travaux sur des approches d’étude de métabolisme, l’équipe STEEP travaille sur l’élaboration d’un outil numérique, le logiciel STAX. Au-delà du développement de modèles facilitant l’analyse de la situation existante qui constituait le cœur de précédents travaux de recherche, il s’agit ici de permettre une exploration des alternatives possibles pour l’avenir, au sens de leur cohérence physique, tout en permettant à l’utilisateur de réfléchir ses propres contraintes.
L’objectif de cette thèse est d’ancrer cet outil numérique dans l’accompagnement territorial en l’instanciant pour la région Grenobloise et en accompagnant son usage. Cette l’instanciation visera à servir de support à des dialogues et décisions d’acteurs du territoire en lien avec système agroalimentaire en leur offrant une vision systémique de tout l’écosystème productif grenoblois lié directement et indirectement au système agroalimentaire. Il s’agit donc, là, de penser et évaluer la mise à l’épreuve de l’outil et d’en adapter à la fois le modèle sous-jacent et l’interface utilisateur, impliquant différentes questions de recherche : comment réaliser réellement une analyse flux-stocks pour le système agroalimentaire de la région Grenobloise (vu comme nexus du système économique territorial) ? Comment penser l’intégration des modélisations sectorielles existantes et à construire dans un unique référentiel de modélisation ? Comment intégrer ce travail de diagnostic dans le logiciel STAX avec, pour mise à l’épreuve de l’outil, la compatibilité entre les spécificités du territoire et des données disponibles avec les entrées de l’outil ? Du diagnostic, comment aller vers de la conception d’alternatives dans ce contexte territorial précis ? Comment la mettre en test ? Et quelle évaluation de ce travail de terrain, pour penser l’adaptation de l’outil en parallèle de son développement, afin de penser à la fois la généricité de ce travail en permettant son adaptation à d’autres contextes mais aussi de penser son ancrage dans ce contexte situé ?
Summary
In a context of environmental degradation, various studies are being conducted to challenge the biophysical organization of our societies, with a focus on analyzing material and energy flows. Most of these initiatives involve analyzing the existing situation and proposing alternatives that balance flows, control the associated environmental pressures, and integrate additional political, economic, and social constraints. To support and facilitate these analyses, and in line with ongoing work on metabolism study approaches, the STEEP team is developing a digital tool, the STAX software. Beyond the development of models facilitating the analysis of the existing situation, which was the focus of previous research, the aim here is to enable the exploration of possible alternatives for the future, in terms of their physical consistency, while allowing users to consider their own constraints.
The aim of this thesis is to anchor this digital tool in regional support by implementing it for the Grenoble region and supporting its use. This implementation will aim to support dialogue and decision-making among regional stakeholders involved in the agri-food system by offering them a systemic view of the entire Grenoble production ecosystem directly and indirectly linked to the agri-food system. The aim is therefore to consider and evaluate the testing of the tool and to adapt both its underlying model and user interface, which raises a number of research questions: how can a flow-stock analysis be carried out for the agri-food system in the Grenoble region (seen as the nexus of the regional economic system)? How can we integrate existing and future sectoral models into a single modeling framework? How can we integrate this diagnostic work into the STAX software, testing the tool's compatibility between the specific characteristics of the territory and the available data with the tool's inputs? From the diagnosis, how can we move towards designing alternatives in this specific territorial context? How can it be tested? And how can this fieldwork be evaluated in order to adapt the tool in parallel with its development, with a view to both ensuring the generic nature of this work by allowing it to be adapted to other contexts and considering its anchoring in this specific context?
Domaine
Cette thèse fait surtout appel aux domaines de la modélisation environnementale (outils basés sur de l’optimisation sous contraintes dans notre cas, [9, 10]) et concernera aussi des questions de visualisation de données et d’interface utilisateurs.
La finalité s'insère dans les domaines interdisciplinaires des sciences de la soutenabilité et de la prospective.
Objectifs
Dans le contexte expliqué ci-après, l’équipe STEEP développe des outils (méthodologies, algorithmes, logiciels, outils de visualisation) permettant à des acteurs nationaux ou locaux de modéliser et « d'évaluer » des alternatives socio-techniques pour leur territoire : des scénarios reposant sur des choix de modes de production et de consommation. La production et la consommation peuvent ici concerner tout type de produits (technologiques, alimentaires, etc.), de ressources, d'infrastructures (bâtiments, routes, …), etc. L’objectif global de la thèse est d’instancier un tel modèle pour le système agroalimentaire de la région grenobloise et de le tester auprès de publics locaux.
Modalités d'encadrement, de suivi de la formation et d'avancement des recherches du doctorant
La thèse se déroulera au sein de l'équipe STEEP, à Inria/LJK. L'encadrement scientifique sera assuré par Emmanuel Prados (modélisation systémique) et Mathilde Boissier (mathématiques et ingénierie de la participation) avec l’appui technique de Jean-Yves Courtonne (sciences de l’environnement, modélisation). Le sujet de thèse concerne l’instanciation d’un modèle/logiciel de l’équipe (STAX – Socio-Technical Alternatives eXplorer) sur le territoire grenoblois ainsi que l’adaptation du modèle aux besoins spécifiques du territoire. Ce modèle visera à fournir une vision systémique de tout l’écosystème productif grenoblois lié (directement et indirectement) au système agroalimentaire qui sera alors considéré comme le centre d’un nexus territorial fondamental. Le doctorant pourra s’appuyer sur l’équipe de développement du logiciel (Jean-Yves Courtonne et Peter Sturm, chercheurs ; Alexandre Honorat et Roger Pissard, ingénieurs ; et Thibaut Coudroy, doctorant). Jean-Yves Courtonne et les partenaires de l’équipe STEEP (dont nos partenaires INRAE) assureront l’apport de compétences nécessaires à la modélisation du système agroalimentaire. Renaud Metereau (MCF, socio-économie) et Sophie Wahnich (DR CNRS, histoire et anthropologie), tous les deux membres de l’équipe STEEP, seront aussi en appui sur des aspects SHS. Emmanuel Prados sera responsable et encadrera l’ensemble du projet ; il servira d’intermédiaire avec les acteurs, en particulier les collectivités territoriales. Le suivi reposera principalement sur des réunions hebdomadaires entre encadrants et doctorant. Les réunions avec les partenaires et les développeurs seront réalisés en présence des encadrants.
Principales activités
Méthode
Le travail envisagé se déroulera en plusieurs étapes.
1. Réaliser une analyse des flux et stocks de matière et d’énergie du système agroalimentaire (« élargi » aux autres secteurs économiques qui y sont directement ou indirectement reliés) sur le territoire de la région Grenobloise. Par rapport aux modèles couramment mis en œuvre par l’équipe, l’enjeu est de parvenir à une description de l’ensemble de l’économie (pas seulement d’une filière particulière) [12]. Certains secteurs (dont notamment une partie du secteur agricole) ont déjà été modélisés finement dans des projets précédents [13]. Les secteurs manquants seront modélisés plus grossièrement en utilisant le cas échéant des coefficients connus à l’échelle nationale et les statiques socio-économiques locales (emploi sectoriel, démographie, revenus disponibles…). Ce travail permettra de fournir un point de départ pour les exercices de prospective.
2. Instancier le logiciel STAX pour le territoire grenoblois. Cette instanciation requiert deux éléments : (i) une définition de la structure du modèle, en langage mathématique, définir un graphe bipartite directionnel constitué de produits et de secteurs reliés entre eux ; le choix de la granularité et des secteurs clé se fera en fonction des questions de prospective jugées prioritaires par l’équipe et par un panel d’acteurs territoriaux qui collaborent déjà avec STEEP ; (ii) pour chaque secteur et mode de production ou consommation pris en compte, une fonction de production doit être définie (relation entre ce que consomme le système et ce qu’il produit). Cela se fera via l’utilisation de fonctions de productions connues au niveau national mais aussi via la littérature et d’éventuels entretiens avec des experts. Des analyses de sensibilité seront effectuées pour déterminer la variabilité des résultats du modèle par rapport aux hypothèses fournies en entrée.
3. Une fois STAX instancié, la conception d'une alternative socio-technique s'effectuera à l'aide d'une interface homme-machine dédiée. On peut s'imaginer cela comme un système d'édition graphique, permettant de sélectionner lesdits modes de production et consommation parmi le catalogue de modes pré-définis et sélectionner leur intensité (ex : quelle proportion de la population est végétarienne ou omnivore etc.). Une 1ère version de cette interface a été développée, à l'aide de deux ingénieurs (Alexandre Honorat et Roger Pissard). Le doctorant sera chargé de tester cette interface et de proposer des améliorations en vue du test sur un public « réel ».
4. L’étape finale est d’évaluer la prise en main et l’effet de l’outil sur différents publics (élus, techniciens, associations, habitants) : est-ce compréhensible ? avec quel niveau d’accompagnement et de formation initiale ? Les utilisateurs seront notamment placés dans des cas où ils doivent arbitrer entre différents usages d’une ressource rare (eau, énergie…). Les observations et analyses des discours au cours des ateliers ou lors d’entretiens a posteriori permettront d’estimer quel usage est fait de l’outil, comment il est perçu, quels sont les biais éventuels, etc. [14] et enfin quel accompagnement du dialogue et de la décision publique est permis par un tel outil d’analyse flux-stocks [15]. Idéalement, cela se fera dans le cadre d’un vrai exercice de prospective territorial piloté par les collectivités et agences, mais nous n’avons à ce stade pas de garantie là-dessus.
Résultats attendus
5. Modèle des flux de matières et d’énergie actuels sur le territoire de la région grenobloise pour le secteur de l’agroalimentaire (élargi).
6. Identification de la granularité pertinente (en termes de secteurs productifs et de modes de production et de consommation) pour un usage de prospective, et calibration des fonctions de production associées.
7. Instanciation de STAX sur l’aire grenobloise à partir des éléments précédents.
8. Validation expérimentale (au sein de l’équipe de recherche et avec des personnes du territoire).
9. Définition d’un cahier des charges pour l’évolution de l’interface utilisateurs (itérations).
10. Rédaction de publications.
Objectifs de valorisation des travaux de recherche du doctorant : diffusion, publication et confidentialité, droit à la propriété intellectuelle, ... :
11. Publications scientifiques.
12. Un des objectifs de la thèse est de tester le modèle auprès de différentes personnes sur le territoire grenoblois (élus, chargés de mission, habitants…) en leur faisant modéliser leurs futurs souhaitables et en les amenant à arbitrer sur des allocations de ressources.
13. Une valorisation potentielle dans le cadre du Conseil Scientifique “Climat et Transition” de Grenoble Alpes Métropole. (Voir la section « Collaborations envisagées » ci-dessous).
Collaborations envisagées
Voir "Ouverture Internationale" (collaboration potentielle donc).
Sur les aspects environnementaux, nous envisageons des collaborations potentielles avec TerriFlux (une startup issue de l’équipe STEEP, et négaWatt (
L’équipe STEEP ne dispose pas de compétences dans le domaine de l’IHM. Nous prévoyons une collaboration avec une équipe IHM, idéalement en local ; par exemple avec l’équipe EHCI (Engineering Human-Computer Interaction) du LIG avec laquelle nous n’avons pas encore pris contact dans ce cadre. Nous prévoyons aussi éventuellement de reprendre contact avec l’équipe AVIZ (une équipe pluridisciplinaire de l'Inria et de l'Université Paris-Saclay visant à améliorer l'analyse et la visualisation d'ensembles de données vastes et complexes en combinant des méthodes d'analyse avec des visualisations interactives. – – Ceci nous laisse ainsi envisager un possible partenariat avec la Métropole qui pourra faciliter la mise en place de terrains et l’accès à différentes données. Notre partenariat existant avec l’Agence d’urbanisme de la région grenobloise dans le cadre de
L'équipe dispose des moyens nécessaires pour financer des missions, ordinateur, etc.
Références
[1] Media-Release-Global-Assessment-Fr
[2] les- scenarios/
[3]
[4] [10] Krzysztof Apt, Principles of Constraint Programming. Cambridge University Press, 2003.
[11] Coudroy, T., Courtonne, J. Y., Sturm, P., Fenet, S., Boissier, M., & Brauner, N. (2025, February). Exploration et évaluation d'Alternatives Socio-Techniques. In ROADEF 2025-26ème congrès annuel de la Société Française de Recherche Opérationnelle et d'Aide à la Décision.
[12] Borthomieu, A.. Vers une description biophysique de l'économie française :
contributions méthodologiques à l'assemblage de modèles de filières. Thèse de doctorat en mathématiques et informatique. Université Grenoble Alpes.
[13] Madelrieux S., Galibert A., Hittner E., Boissier M., Alapetite J., Pannier A., Grillot M., Pasteur A., Courtonne J-Y., 2024. Analyse socio-métabolique des filières et de leurs vulnérabilités. Etude du cas des filières agricoles aux échelles nationale et locale.
Rapport final projet Scalable, ADEME, 184 pages
[14] Hamilton S., Fu B., Guillaume J., Badham J., Elsawah S., et al., 2019. A framework for characterising and evaluating the effectiveness of environmental modelling. Environmental modelling & software, 118, 83-98.
[15] Gabriel A., Madelrieux S., Lescoat P.. A review of socio-economic metabolism representations and their links to action: Cases in agri-food studies. Ecological Economics, 178, 106765.
Compétences
Profil et compétences recherchées
- Formation scientifique
- Modélisation environnementale (ressources, énergie…)
- Animation d’ateliers mobilisant des outils de modélisation avec des publics non spécialistes.
Profile and skills required
- Scientific training
- Environmental modeling (resources, energy, etc.)
- Facilitation of workshops using modeling tools with non-specialist audiences.
Avantages
14. Restauration subventionnée
15. Transports publics remboursés partiellement
16. Congés: 7 semaines de congés annuels + 10 jours de RTT (base temps plein) + possibilité d'autorisations d'absence exceptionnelle (ex : enfants malades, déménagement)
17. Possibilité de télétravail (après 6 mois d'ancienneté) et aménagement du temps de travail
18. Équipements professionnels à disposition (visioconférence, prêts de matériels informatiques, etc.)
19. Prestations sociales, culturelles et sportives (Association de gestion des œuvres sociales d'Inria)
20. Accès à la formation professionnelle
21. Sécurité sociale
22. Participation employeur mutuelle santé (sous conditions)
Rémunération
Année 2025 : 2200 euros gross salary /month
Année 2026 : 2300 euros gross salary /month
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