Résumé du projet Vertiqual :
Cette thèse s'inscrit dans le cadre du projet de recherche collectif Vertiqual « Vers une politisation et une requalification du sous-sol », projet ciblé du PEPR « Sous-sol bien commun » financé par France 2030.
Alors que la fin du 20e siècle semblait signer la fin des activités minières sur le territoire métropolitain, la dernière décennie a marqué un important retour en grâce des activités d'exploitation du sous-sol en France. Les nouveaux projets de stockage sous-terrain de CO2, de géothermie, ou d'extraction de Lithium sont devenus une priorité pour le gouvernement et les acteurs économiques à l'heure des grands projets de décarbonation de l'économie. Rassemblant des politistes, historiens, anthropologues et géographes issus de six institutions de recherche et d'enseignement supérieur, le projet Vertiqual interroge les processus contemporains de redéfinition et de politisation des usages du sous-sol français. S'inscrivant dans une perspective de « géologie politique » (Bobbette et Donovan 2021), il vise à établir une cartographie des différents discours et acteurs mobilisés autour des enjeux du sous-sol français, à mieux saisir les controverses et leurs spécificités, et à comprendre les dynamiques de repositionnement des acteurs. Le projet étudie ainsi 1) comment la mobilisation du sous-sol dans le cadre de la transition socio-écologique suppose de requalifier des pratiques, des héritages sociotechniques, des acteurs, des discours, ou encore des politiques liées au sous-sol, 2) comment la matérialité du sous-sol est définie, redéfinie, et performée par différents acteurs (ressources, déchets, espace de stockage, etc.), ainsi que 3) les tensions et les controverses auxquelles ces recompositions donnent lieu.
Objectifs de la thèse :
Située au carrefour de l'ethnographie des sciences (Houdart 2015), de l'anthropologie des infrastructures des Maintenance studies (Denis et Pontille 2021), et du « tournant géosocial » (Clark et Yusoff 2017) des humanités environnementales, cette thèse consistera en une approche anthropologique des savoirs, pratiques et controverses liées au devenir des anciennes galeries de mines après la fin de leur exploitation. Longtemps après la fermeture des mines, les régions où l'on a creusé profondément la Terre continuent de faire face à des problèmes de subsidence, d'effondrements, de pollution des nappes, ou encore d'inondations, qui sont directement liés à la présence sous-terraine des anciennes galeries. Malgré l'abandon des activités extractives, ces anciennes mines constituent autant de « communs négatifs » (Monin 2021) et devront, pour longtemps encore, être inspectées, réparées, maintenues par des personnes qui en connaissent intimement la géographie, les matériaux, et les dangers. Loin d'être une donnée d'entrée, la stabilité du sol apparaît alors comme une performance (Meulemans 2022) mettant en jeu de nombreux acteurs, allant des spécialistes nationaux aux anciens travailleurs de la mine ayant conservé la mémoire du sous-sol, qui doivent composer sur le temps long avec les matériaux, les outils, les règlements et les savoirs qui constituent ces infrastructures jamais complètement abandonnées, mais toujours « à stabiliser ».
Au sein des sciences sociales, la thématique de l'après-mine a été explorée sous l'angle de la reconversion économique des territoires post-miniers, de la patrimonialisation, des déchets, ou encore de la renaturation des sites dans le cas des mines à ciel ouvert. En dialogue avec ces travaux, cette thèse apportera une contribution ethnographique originale sur la maintenance de l'équilibre précaire du sol lui-même, qui oblige à prolonger indéfiniment des attachements à ces sous-sols infrastructurés que beaucoup croient appartenir au passé.
Méthodologie :
La thèse s'appuiera sur un travail ethnographique mené auprès de plusieurs groupes d'acteurs, parmi lesquels : 1) les techniciens, ingénieurs, cartographes et autres spécialistes impliqués dans ces opérations de maintenance et qui travaillent souvent au plus près de la matière ; 2) les riverains victimes d'affaissements de terrain, d'inondations, de fissures, ainsi que les associations qui les représentent, les élus, les assurances et leurs experts ; 3) le cas échéant, les acteurs des projets actuels de réinvestissement des anciennes mines par des projets de géothermie profonde ou de stockage de déchets.
Une telle ethnographie suppose une présence longue sur le terrain choisi, l'établissement de relations de proximité et de confiance avec certains enquêtés, une écoute attentive et un travail patient de plusieurs mois pour réaliser des entretiens individuels et de groupes. De nombreuses possibilités de terrain existent, et certains sites pourront être investigués de manière conjointe avec d'autres membres du projet. Les terrains devront toutefois être réalisés en France métropolitaine.
Références :
Bobbette, A., & Donovan, A. (2021). Political geology. Oxford : Oxford University Press.
Clark, N., & Yusoff, K. (2017). Geosocial formations and the Anthropocene. Theory, Culture & Society, 34(2-3), 3-23.
Denis, J., & Pontille, D. (2022). Le soin des choses : Politiques de la maintenance. la Découverte.
Houdart, S. (2015). Les incommensurables. Paris : Zones Sensibles.
Meulemans, G. (2022). Solidifying grounds : The intricate art of foundation building. Theory, Culture & Society, 39(2), 75-94.
Monnin, A. (2021). Les « communs négatifs » : Entre déchets et ruines. Études, 59-68.
Contexte de travail
Le doctorant ou la doctorante sera dirigée par Germain Meulemans, Chargé de recherche en anthropologie (CNRS/CAK) et Sophie Houdart, Directrice de recherche en anthropologie (CNRS/LESC). Il/elle sera hébergée au Centre Alexandre-Koyré (UMR 8560 EHESS, CNRS, MNHN), où il/elle bénéficiera d'un espace de travail, d'un ordinateur et de l'accès à l'environnement scientifique et aux infrastructures collectives du tout nouveau Campus Condorcet.
Le poste se situe dans un secteur relevant de la protection du potentiel scientifique et technique (PPST), et nécessite donc, conformément à la réglementation, que votre arrivée soit autorisée par l'autorité compétente du MESR.
Informations complémentaires
Profil attendu :
Le / la candidat(e) possèdera un Master 2 en sciences sociales, de préférence en anthropologie. Une connaissance du champ des Science and Technology Studies (STS) serait appréciée, et une spécialisation sur les questions environnementales ou minières serait bienvenue. Le/la candidat(e) aura une expérience dans la réalisation d'enquêtes ethnographiques ainsi que de solides capacités d'écriture en français et des compétences en anglais scientifique. Une bonne aptitude à travailler en autonomie ainsi qu'en environnement collectif interdisciplinaire est également souhaitée, ainsi qu'une motivation robuste à mener à bien un travail de thèse en sciences sociales.
Pour candidater, merci de déposer sur Portail Emploi :
- Une lettre de motivation
- Un CV mentionnant les notes de Master 1 et 2
- Un échantillon d'écriture : si possible un chapitre du mémoire master
Une audition sera organisée le 21 juin et/ou début juillet pour les personnes sélectionnées sur dossier.
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