Hommage à l’architecte paul chemetov (1928 – 2024)

Hommage à l’architecte Paul Chemetov (1928 – 2024)

L’architecte Paul Chemetov est mort le 16 juin à l’âge de 95 ans. Né en 1928 à Paris, il aura œuvré plus de soixante ans à la conception de la cité, militant pour une ville égalitaire. Il a toujours défendu un idéal social et humaniste, s’intéressant autant aux usagers qu’à la qualité du bâti et de son environnement.

En 1961, deux après avoir obtenu son diplôme, il avait rejoint l’atelier d’urbanisme et d’architecture (AUA) fondé par un petit groupe d’architectes, urbanistes et décorateurs qui réunit en outre des ingénieurs, des sociologues, des paysagistes. Au sein de l’AUA, qui fonctionnait sous la forme d’une coopérative où se partageaient les moyens matériels et s’échangeaient les idées, il réalisa des équipements publics et de très nombreux immeubles d’habitat (plus de 7000 logements), principalement sociaux et en priorité dans la banlieue «rouge» de Paris, essayant d’éviter la répétition et d’apporter de la qualité et du bien-être.

C’est à l’Atelier qu’il rencontra l’architecte chilien Borja Huidobro avec qui il s’associa par la suite, et avec qui il réalisa ses projets les plus connus que sont le ministère des Finances et de l’Économie et la Grande galerie de l’évolution du Museum d’histoire naturelle à Paris. Au cours de sa longue carrière il a également contribué à la requalification de plusieurs villes. Soucieux de la sauvegarde du patrimoine, et notamment du patrimoine moderne du XX e siècle, il s’y est directement impliqué en tant qu’architecte de réhabilitations, à l’instar de celle de deux petites tours de logement livrées en 1967 par l’Atelier de Montrouge à EDF: un atelier qui, comme l’AUA, se démarquait dans la production de masse de l’époque. Ces deux maison-tours de 5 et 7 étages réalisées en béton coulé en place, dont il salua l’intelligence de conception, avaient subi des dégradations importantes et furent menacées de démolition. La réhabilitation qu’il a conduit a permis non seulement de sauver une architecture exemplaire mais aussi d’en améliorer le confort thermique et de l’adapter à l’évolution des usages, comme le montre l’article de Norbert Laurent publié dans la revue Construction moderne en mars 2017.

Concepteur et intellectuel engagé, infatigable débatteur ou tribun, il également assumé différentes fonctions comme membre du comité directeur du Plan construction puis vice-président, co-président du comité scientifique du Grand Paris ou encore responsable du secteur développement de la Stratégie nationale pour l’architecture.

De nombreux prix et médailles lui ont été décernés comme le Grand prix national d’architecture en 1980, ou, récemment, la médaille d’or de l’Académie d’architecture.

Enseignant à l’École nationale des ponts et chaussées puis à École polytechnique de Lausanne (EPFL), Paul Chemetov aimait transmettre aux jeunes architectes.

Enfin, en tant que président de l’association Betocib, il créa en 2011 avec l’architecte Franck Hammoutène (1954-2021), le Trophée béton écoles qui récompense des projets de fin d’études utilisant du béton de manière judicieuse de jeunes diplômés en architecture : une manière de leur donner une visibilité et de les encourager au moment de leur entrée dans la vie professionnelle. Plusieurs lauréats ont ensuite rejoint l’agence de Paul Chemetov. En 2016, il lance le Trophée béton Pro, avec l’architecte-ingénieur Étienne Tricaud qui lui succède comme président de Bétocib ; il sera resté président d’honneur jusqu’à son décès. Ce Trophée biennal récompense des réalisations remarquables en béton d’au plus trois ans, une occasion de valoriser les performances innovantes du matériau et de les encourager.

La «grande famille» du Tophée Béton et le «collectif», formé par les adhérents de Bétocib comme les nommait Paul Chemetov, sont émus par la disparition de ce grand homme.

Tous échangeaient et partageaient très régulièrement avec lui depuis plusieurs années, souvent dans son atelier du 13 e arrondissement ou à la maison de l’architecture d’Île-de-France. Claire Barbou, architecte de formation et secrétaire générale de Bétocib rend hommage au nom de tous à son président d’honneur, qui fût avant tout d’un grand soutien à l’architecture et à la cité mais aussi au matériau béton qui, selon lui est en éternelle évolution… et «n’en est qu’au début de son histoire».

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